Parsemés par un Dieu négligent, des arbres courbés sur leurs racines , parfument le désert d'une musique frileuse. Là-bas, au delà de mon regard, par dessus le ciel et le sable, l'horizon tremble Le sol vibre à peine, pour ne pas réveiller le vent, pour ne pas effrayer le silence. Mon corps est mort, mon âme endormie. Des ombres se peignent enfin sur ma vision brouillée. Je devine, plissés entre l'or et le bleu, les filaments friables des chameaux porteurs d'eau, silhouettes contenues en lenteur vague et souple. L'ondulation étrange me façonne et m'enivre. Je flanche. Des hommes vivent là. Lorsqu'ils passeront prés de moi, je fermerai les yeux. Je garderai sur ma peau le voile léger de leur marche. Je garderai sur mon coeur la violence désirée d'une liberté fragile. Dernière caravane. Sur son chenal pavé d'Honneur, elle emporte avec elle les restes de désir, de poésie sableuse. Là-bas, au delà du temps, par dessus la mort, je regarde l'image fossile d'un mirage perdu. *** L’Ehan* agite doucement ses ailes. Je m’approche et j’entends le bruissement du thé trois fois versé. J’entre. Sous la toile, à l’abri des tempêtes, les cuirs patinés, les coffrets informels, les coussins lustrés, les tapis cumulés, les pyramides des tissus : l’étreinte lumineuse se durcit et s’écrase sous le poids des mémoires. Les corps flasques des outres noircies espèrent le gonflement d’eau qui leur donnera vie. Dans le reflet songeur d’un plateau cuivré, la théière suppose la soif d’un savoir à venir. J’écoute. Je frissonne de paroles murmurées. Des morceaux de pensée se décrochent des lèvres et s’en vont lécher le toit mouvant des cieux. Le dôme universel appuie ses outrances sur les piliers fragiles de l’asile nomade. * tente |